Prophétie Nordique
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 Deux reines chez les Nymphes [Ne pas archiver]

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Alphaïde
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MessageSujet: Deux reines chez les Nymphes [Ne pas archiver]   Deux reines chez les Nymphes [Ne pas archiver] EmptyMar 28 Juil 2009 - 15:02

An 835
Troisième jour de la douzième semaine
Début de matinée



L’eupherusa que l’on apporta à la reine un après-midi de la onzième semaine était réellement splendide. Perché sur le doigt d’une grande Nymphe comme sur une branche, ces petites pattes ne l’autorisant pas à se poser au sol, il emplissait la pièce de son chant mélodieux et ravissait la vue par son lumineux plumage. Toutes les teintes du vert et du bleu, du plus clair au plus profond, se peignaient sur ses plumes soyeuses.
Néanmoins c’était plus pour le message qu’il apportait que pour sa grande beauté qu’il se trouvait dans les petits appartements d’Alphaïde.
La reine s’approcha doucement pour ne pas l’effrayer, bien que l’oiseau soit peu farouche, et retira délicatement le fin rouleau de papier attaché d’un fil à sa patte. L’oiseau cessa un instant ses vocalises puis, comme s’il eut été fier de sa mission accomplie à travers l’Ellendwraï, il reprit de plus belle.

C’est donc au chant de l’eupherusa qu’Alphaïde déplia le mince rouleau. Les mots écrits à l’encre bleu clair couraient sur le papier blanc avec la grâce de l’écriture de la reine Eluthiel Gil’Rea. Ce qui n’étonna pas vraiment Alphaïde : qui d’autre lui enverrait un message par eupherusa si ce n’est sa voisine ? Ce moyen de communication simple et discret n’était cependant efficace que sur courtes distances et surtout, qu’à l’intérieur de la Forêt. Envoyer un eupherusa couvrir la distance Iboa-Unae ? : le meilleur moyen que le message n’arrive jamais à destination. Mais à Ellendwraï, personne ne s’étonnerait de voir cet élégant oiseau voler de cime en cime, et personne ne chercherait à le capturer.

L’eupherusa chantait toujours quand la jeune reine termina sa lecture. La reine elfe souhaitait la voir, et pour ça elle proposait de se déplacer jusqu’à Kalye. Alphaïde sourit : elle aussi voulait s’entretenir avec sa voisine, elle pensait même aller à la Tour céleste sous peu.
L’eupherusa pourrait chanter s’il le voulait en apportant la réponse au combien ravie de la reine des Nymphes à la reine des Elfes.




Alphaïde s’était couchée tard. C’est qu’elle avait veillé une partie de la nuit l’arrivée de son invitée. La reine Eluthiel n’était pas n’importe qui et même si elle voyageait léger, entendons par là qu’elle n’amenait avec elle qu’un faible escorte, elle restait une fille de Baldr, une puissante reine et une voisine appréciée. La jeune Nymphe ne se voyait pas aller au lit avant que la reine Eluthiel ne fut là.
L’Elfe fut donc reçue par son hote au perron du palais. Les salutations furent brèves et chacun se coucha vite.
Mais malgré cette courte nuit, Alphaïde se leva tôt. Elle n’appela personne, ouvrit les fenêtres sur l’air encore piquant des jardins et resta là. L’astre de Mani s’évaporait tendrement dans le ciel immaculé de ce début de journée. Nul bruit ne venait troublait cette lente disparition. La tête posée contre le montant de la fenêtre, Alphaïde pensa au peuple du dieu de la Lune, ses voisins eux-aussi. Elle y était allée plus jeune : elle revoyait la Serre et ses mille merveilles, la splendide architecture de la demeure royale, elle se souvenait de la statue du dieu Mani, tournée vers le ciel. Elle avait alors discutait avec le prêtre et depuis, elle pensait souvent qu’Elfes, Druides et Nymphes étaient faits pour s’entendre. Le reste du Gwendir l’ignorait, à vrai dire le reste du Gwendir s’en fichait pas mal, mais beaucoup de récits nymphes racontaient l’entente particulière qui unissait la déesse au cygne et le dieu de la nuit. Quoi de plus naturel pour deux peuples si proches de la nature ?

Alphaïde laissa dans ses rêveries le roi Galdor, vite croisé à la Tour sombre, et son peuple quand le premier oiseau se mit à siffler. Les jardins s’éveillaient : doucement, chaque oiseau habitant les lieux défroisserait ses plumes, chaque plante y poussant dévoilerait ses couleurs au soleil renaissant. Il était temps pour la reine de se préparer.

Quittant l’embrasure de sa fenêtre, Alphaïde se plia au rituel matinal, seulement troublé par l’arrivée de son écureuil. Aloysia, d’humeur taquine, s’ébroua un instant dans la vasque, faisant voler l’eau fraiche en goutellettes fines, avant de repartir vers les jardins, la queue sertie de mille diamants liquides.


Ses préparatifs finis, elle se rendit au salon. La faible fréquentation des grands couloirs à cette heure encore matinale la laissa réfléchir sur les motifs de la venue d’Eluthiel aussi bien que sur ses propres motivations à l’accepter. En peu de temps, beaucoup de choses préoccupaient l‘esprit collectif. Il y avait eu l’Erastide et son drame mais d’un point de vue plus général, de grandes et petites choses s’étaient passées : le procès du ministre Aziel’Da, la disparition des fils d’Yswllyra, la présence des troupes d’Ardiosis... Et puis on commençait à dire qu’en terres amazones et druides, les bêtes succombaient allègrement à une maladie inconnue. Nul doute que si le fléau continuait, pire même s’étendait, la situation allait s’en trouvait compliquée.

Elle était arrivée chemin faisant au salon où l’attendait une petite table joliment dressée pour deux. Comme il en était de coutume depuis longtemps entre souverains nymphe et elfe, ce petit rendez-vous privé et informel commencerait par une légère collation. Ne s’accordant qu’un petit biscuit en attendant son hôte, Alphaïde reprit sa rêverie devant le soleil qui avait finit par vaincre la lune.
Pour cette journée.
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MessageSujet: Re: Deux reines chez les Nymphes [Ne pas archiver]   Deux reines chez les Nymphes [Ne pas archiver] EmptyDim 23 Aoû 2009 - 15:26

Depuis qu’Eluthiel avait reçu la visite des deux jeunes monarques amazones et ombres, elle avait décidé de consulter sa voisine nymphe sur les affaires actuelles du continent gwendirien. Mais lorsqu’elle apprit les milles et uns remous qui secouaient les royaumes ces derniers temps, la visite était devenue plus qu’urgente. Avant l’envoi d’une quelconque demande, la Reine des Elfes avait dû consulter le Conseil des Anciens qui, en vertu de l’ancienne relation qui liait les peuples Elfes et Nymphes, n’avait pu qu’accepter. Dès qu’Eluthiel détint une réponse favorable à sa requête, elle se précipita dans sa chambre, s’assit à son secrétaire et rédigea sur un petit morceau de papier quelques mots résumant sa venue chez sa voisine Alphaïde Elwing.

Citation :
Ma chère consœur et Reine des Nymphes,

Je vous pris de bien vouloir accepter ma visite dans les plus brefs délais.
Plusieurs affaires secouent les vastes terres continentales du Gwendir et je dois à présent, dans le but de définir les choix à tenir prochainement, consulter votre esprit et votre cœur pur. Il m’est utile et essentiel de connaître votre opinion, qui je le sais, est toujours sage et réfléchi.

En attendant notre rencontre, et au nom du peuple de Baldr, je vous salue bien bas.

Eluthiel Gil’Rea, Reine des Elfes.

Du bout de sa plume de phénix, Eluthiel mit le point final et signa la lettre. Elle la roula délicatement et la cacheta du sigle royal. Elle sortit alors d’un des tiroirs de son secrétaire un magnifique fil d’or. Bien que celui-ci fût fin et délicat, il était aussi solide et résistant qu’une corde que l’on utilise pour les instruments. La jeune femme se dirigea ensuite vers la cage du couple d’eupherusas qui inondait la chambre de leur chant mélodieux. Eluthiel glissa sa main blanche dans la cage et le plus gros des deux se posa sur sa main qu’Eluthiel retira doucement de la maison en ivoire. Très délicatement, elle attacha le petit bout de papier à la patte. L’oiseau la fixa de ses petits yeux brillants et se mit à voleter soudainement dans la pièce. La Reine ouvrit sa fenêtre et, en langage elfique, ordonna à l’oiseau de se rendre chez la Reine des Nymphes. En effet, cette méthode de communication était largement utilisée chez les peuples de l’Ellendwraï et l’eupherusa avait été domestiqué en fonction.

Quelques jours plus tard, un matin ensoleillé, tandis qu’Eluthiel se promenait dans les jardins royaux, un petit eupherusa vint se poser sur son épaule. A sa patte, un petit papier était accroché. La réponse nymphe. La Reine le décrocha avec une grande délicatesse et le parcourut des yeux. Alphaïde Elwing acceptait de recevoir l’Elfe pour le troisième jour de la douzième semaine. Ravie, la jeune femme ordonna immédiatement qu’on lui préparât une petite valise et que l’on selle sa jument Alcarinquë pour le matin du premier jour à venir. Prestement, elle retourna dans chambre et remis l’oiseau dans sa cage, piaillant de joie de retrouver sa moitié à plume.

Au matin du premier jour, alors que l’astre de feu venait d’apparaître, Eluthiel enfourcha sa monture et, en compagnie d’une petite escorte, partit en direction de Kalye. La garde royale mit deux jours pour atteindre la capitale nymphe. Arrivée durant la nuit, Eluthiel fut reçue par sa consœur. Peu de mots furent échangés, toutes deux étant lasses et souhaitant se coucher rapidement. A son réveil, la chambre dont Eluthiel était l’hôte pour quelques jours baignait dans un soleil resplendissant. La pièce, dans les tons pastel, rappelait les goûts délicats des Nymphes. La valise de la Reine avait été rangée et une tenue vestimentaire avait été préparée par ses suivantes. C’est de bonne humeur qu’Eluthiel quitta son lit pour rejoindre la salle d’eau, tout aussi magnifiquement décorée. Après une toilette, Eluthiel s’habilla et coiffa sa tête de sa couronne d’argent. En déplacement, coutume oblige, elle se devait de la porter. La jeune femme sortit de sa chambre et tomba nez à nez avec une gardienne qui l’informa que la Reine des Nymphes l’attendait dans le Salon.

Je vous remercie, Fille de Jord. Pourrais-je vous demander de me mener jusqu’à votre reine ? Cela fait plusieurs années que je ne suis plus venue ici et malgré ma mémoire infaillible, mon orientation me fait bien défaut.

D’un hochement de tête, la gardienne pria Eluthiel de la suivre. Après maints couloirs, Eluthiel arriva dans une grande pièce tout aussi majestueuse. De superbes voûtes semblaient s’élancer vers le ciel, formant des arcs de parts et d’autres. La Reine des Nymphes était installée près d’une table où étaient posés de succulents mets. En effet, leur entretien allait commencer par l’habituelle collation qui permettait aux monarques de converser tranquillement et intimement. Lorsqu’Eluthiel s’approcha d’Alphaïde, celle-ci semblait bercée par une douce rêverie. Eluthiel toussota légèrement, s’inclina respectueusement et s’installa en face de la jeune femme.

Je tiens à vous remercier pour cet accueil attentionné. Comme d’habitude, je suis toujours agréablement surprise par la beauté qui habite ces lieux. C’est tout à fait reposant… Une situation bien en contraste de ce qui se passe à l’extérieur et même en cette contrée. En effet, le peuple de Baldr a été grandement choqué par les terribles faits qui se sont déroulés ici. Au nom des Elfes, je tiens à vous apporter notre entier soutien et je souhaite aussi vous assurer que plusieurs commémorations ont été célébrées dans la demeure de Baldr.

Nous considérons les Nymphes comme nos Sœurs de cœur et de terres. Les racines qui nous lient depuis des générations font que nous nous affectons de toutes tragédies qui vous arrivent…


Eluthiel avait parlé avec son cœur et sa raison. Et chaque mot qu’elle prononçait, elle le pensait intensément.
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MessageSujet: Re: Deux reines chez les Nymphes [Ne pas archiver]   Deux reines chez les Nymphes [Ne pas archiver] EmptyVen 2 Oct 2009 - 11:23

Et réciproquement, croyez-le. Nous avons tous été touchés par cette délicate attention.

Nombreux étaient ceux à la cour, en ville, qui parlaient des offices elfes célébrés depuis l'Erastide : on disait que la Grande Pretresse elle-même les avaient menés, que la foule présente au temple était impressionante pour un drame qui ne les touchait pas. Personne n'imaginait vraiment comment la guerre pourrait entamer les puissants liens qui nouaient ces deux peuples. Certains allaient jusqu'à penser que la plus solide alliance du Gwendir se trouvait là, sous les feuillages d'Ellendwraï.

Par là, Alphaïde s'était posé beaucoup de questions sur les alliances qui se nouaient, et qui comme toutes promesses, finiraient par se dénouer. Amazones et Ombres n'étonnaient personne mais que penser par exemple du ralliement de Galdor à Ardiosis ? Sincère communion de point de vue ou simple accord d'intérêt ? Mais au jeu des chaises musicales diplomatiques, celle sur laquelle la reine nymphe se posait le plus de questions était sûrement l'alliance entre sa voisine Elfe et les Amazones.

Jusqu'à quel point étaient-ils alliés ? On avait soufflé à l'oreille d'Alphaïde que le roi Morzan n'avait pas jugé bon de prévenir Eluthiel de son escapade à Yswllyra mais peut-être Idril l'était-elle, elle. Que valait réellement la grande coalition contre Ardiosis ?

Quoi qu'il en soit, parmi les nombreux sujets importants qui agitaient le continent, c'est évidemment le sien, l'Erastide, qui préoccupait le plus la reine. Et depuis les révélations d'Helvéa, on voyait d'un tout autre oeil les sujets de Freyja dans son entourage.
En effet, le Conseil avait décidé de ne pas ébruiter ces nouvelles. Il n'y avait aucun intérêt à ce que tout Kalye en parle et on avait préféré avoir plus d'informations et de certitudes pour accuser à la face du monde la reine Idril de manipulations et de meurtres. Mais tout de même, dans le cercle politique de la reine, les uniformes bleu amazone se teintaient plus souvent de sang et de colère que d'autre chose.

C'est notamment pour cette raison qu'Alphaïde s'était empressée d'accepter la demande de sa voisine. En tant qu'alliée, on pouvait penser qu'elle savait peut-être quelque chose. Ou du moins, qu'elle en savait plus sur les affaires en cours dans le continent que n'en savaient les Nymphes, tapies dans leur bois.
Alphaïde enchaina donc sur l'affaire de l'Erastide. De nombreuses choses devaient être abordées, et la reine n'oubliait pas que son hôte aussi avait à lui parler.

C'est d'ailleurs à propos de cette douloureuse affaire que je pensais moi aussi vous rendre visite sous peu. J'ai reçu en début de semaine une visite fort intéressante d'une enfant de Baldr. Peu commune, fort magnétisme, intrigante. Elle m'a raconté son histoire et franchement, on aurait pu ne pas la prendre au sérieux tant les conclusions que nous pouvons en tirer nous mènent à accuser de hautes personnes. Mais elle n'avait pas que son histoire et son phénix pour se faire entendre : elle avait ce qu'on ne peut appeler qu'une preuve. Et celle qui nous faisait défaut justement. Je ne vous cache pas que dans les premiers temps, tout le monde accusait plus ou moins ouvertement les Humains ou leurs alliés de ce meurtre. Mais cette Elfe a tout changé en apportant un morceau d'uniforme. Et ce n'est plus à Ardiosis maintenant que certains demandent de rendre compte du sang, versé mais à votre alliée.
Je vous rassure, le Conseil a été gardé au secret et rien n'a transpiré de cet entretien. Étonnement d'ailleurs si on considère la présence de ma cousine mais passons.


Alphaïde revoyait la scène : Helva et son phénix au milieu de la pièce, Pasiphae suspicieuse, les conseillers médusés et l'uniforme reconstitué à terre qui criait la responsabilité des Amazones. Qui croire ?

Je sais que vous ne connaissez pas chacun de vos sujets et je suppose que le nom d'Helva Daline ne vous dit rien. Mais, si je puis me permettre de vous poser cette question, que pensez-vous sincèrement de la reine Idril ? Elle est votre alliée avec Morzan. Jusqu'où irait-elle pour faire peser la balance de son côté ?
Quel intérêt surtout aurait-elle à ce que mon peuple prenne parti ? Qui d'ailleurs tirerait un intérêt à ce que je prenne parti... qui d'ailleurs se soucit de ce que fait ou de ce que ne fait pas mon peuple ?



Un instant, fugace, une ombre passa dans les yeux sombres de la reine, la voix se fit plus grave. Que les Nymphes disparaissent à jamais de la mémoire des belliqueux dirigeants du continent, bien. Il en avait toujors plus ou moins été ainsi. Mais pourquoi fallait-il que soudain, ils se souviennent d'elle quand il s'agissait de se détruire ?
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MessageSujet: Re: Deux reines chez les Nymphes [Ne pas archiver]   Deux reines chez les Nymphes [Ne pas archiver] EmptyDim 11 Oct 2009 - 16:58

La Reine des Nymphes était touchée par les célébrations organisées par le peuple des Elfes. Pour Eluthiel, les hommages rendus à la victime n’étaient que naturels. Baldr était un dieu sage et altruiste et était forcément lui aussi ému par cette terrible histoire. Après les pleurs et les cris, l’encens et les éloges attribués à Jord afin de calmer la peine causée par la perte d’une de ses filles, s’étaient installés le doute et l’étonnement dans le cœur des Elfes. Qui avait pu commettre cet atroce crime ? Bien entendu, plusieurs théories pullulaient dans les rues d’Amil-Gadia mais aucune n’était soutenue par de véritables preuves. Le Conseil des Anciens ne regorgeait que de spéculations aussi farfelues les unes que les autres. Aussi lors de l’entretien avec la Reine, une seule solution aboutit : rendre visite aux peuples des Nymphes. Eowyr Gilmandel avait proposé à la jeune femme de l’accompagner mais celle-ci refusa, résolut à s’entretenir seule avec Alphaïde Elwing. Un lien s’était tissé naturellement entre les deux femmes, venant sûrement des anciennes racines entrelacées de leurs deux peuples.

La Reine des Nymphes arriva rapidement au sujet de conversation tant attendu. Ecoutant attentivement sa consœur, Eluthiel sirotait un thé au goût exquis. Alors qu’elle buvait une énième gorgée, la Reine des Elfes faillit s’étouffer en avalant de travers. Et pour cause, les propos d’Alphaïde la stupéfièrent un instant. En effet, la jeune nymphe lui expliqua qu’une étrange jeune fille appartenant au peuple des Elfes était venue quérir un entretien. Elle fit alors à l’assemblée d’étranges révélations à propos du « meurtre de l’Erastide ». Mais le plus troublant était sûrement l’énonciation d’une preuve matérielle redoutable : un bout d’uniforme qui accusait non pas les Humains comme l’on s’y attendait mais les Amazones ! Eluthiel avala douloureusement sa salive comme si une boule s’était formée dans sa gorge. Son teint pâlit et sa tête tournoya. Une foule de pensées l’envahit et elle ferma les yeux un instant, pensant à la réaction qu’aurait eu son époux face à cette situation…

Quand elle rouvrit les yeux, Alphaïde était toujours là, la mine soucieuse, semblant ailleurs. Eluthiel, étant sur le point de répondre préféra terminer d’écouter la jeune nymphe qui révéla le nom de l’étrangère et ses doutes quant aux alliés d’Eluthiel. Elle questionna l’Elfe sur les monarques ombres et amazones pensant certainement que la Reine des Elfes était la mieux placée pour lui répondre. Jamais Eluthiel n’avait pensé être confrontée à cette situation en venant ici. Elle comprenait la peine de son amie et l’inquiétude qu’elle pouvait avoir vis-à-vis de cette étrangère et des alliées des Elfes. Après avoir épongé les quelques gouttes de thé qui étaient tombées sur sa robe, Eluthiel se leva et s’assit auprès d’Alphaïde. Elle prit les mains de la jeune femme entre les siennes et plongea son regard de mère bienveillante dans les iris sombres de la jeune femme. Compassion et instinct maternel, tels étaient les sentiments qui submergeaient Eluthiel. Cette jeune femme qui avait perdu sa mère et sa sœur était confrontée à de deux grandes décisions qui surpassaient tout être de cet âge et même les plus expérimentés comme Eluthiel. D’une voix douce et réconfortante, la Reine des Elfes tenta de raisonner et d’éclaircir l’esprit de la fille de Jord.

Mon Enfant, ma douce amie, je peux lire la douleur et la fatigue sur vos traits. S’en prendre à vos sujets, à des personnes innocentes est la chose la plus cruelle qu’il soit. Mais les dieux sont impartiaux et savent punir le crime. Sachez que les responsables seront traqués et occis, peu importe la race à laquelle ils appartiennent.

J’en viens ensuite à cette jeune fille, nommée Helveä Daline. Comme vous l’avez soupçonnée, en effet, je ne la connais pas. Aussi, je vous prierais d’être prudente face aux accusations qu’elle a prononcées et aux preuves qu’elle vous a fournies. Il est facile d’accuser à torts et à travers et fournir un bout de tissu. D’autant plus que son témoignage est unique. Je n’ai entendu aucun de mes soldats ou espions m’avertir de la présence de troupes amazones dans la forêt d’Ellendwraï. Et puis, si cette jeune fille est une elfe, n’aurait-elle pas du m’instruire de sa découverte en premier lieu ? Après tout, une nouvelle aussi importante mérite de m’être parvenue, n’est-il pas ?... Je sais bien que le doute martèle votre esprit Alphaïde mais je vous prie d’écouter une enfant du sage Baldr. Ne vous fiez pas au propos d’une inconnue et menez plutôt votre propre enquête !

Enfin, je voudrais répondre à vos questions à propos de mes alliés. Pour vous dire la vérité, je ne les connais en tant que monarque que depuis quelques semaines. J’ai longuement côtoyé leurs parents et s’ils sont les dignes héritiers de leurs prédécesseurs, alors non, aucun des deux n’irait jusqu’à commettre un meurtre pour vous ralliez à leur cause. D’ailleurs, si l’un d’eux avait envoyé une troupe vous attaquer, pourquoi aurait-il laissé leurs véritables uniformes aux soldats ? En effet, s’ils étaient capturés, automatiquement nous aurions su que c’était eux. Or le plus astucieux aurait été d’accuser un autre peuple pour contre balancer le poids des alliances ? Et je peux vous assurer que ces deux jeunes monarques sont loin d’être stupides !

Tout ce que je peux vous dire, ma chère amie, est qu’une preuve aussi flagrante et évidente mérite autant de doute et de recul à son égard…


Eluthiel avait longuement parlé espérant avoir convaincu la jeune reine. Elle souhaitait vivement l’avoir rassurée et avoir éclaircie son esprit. Mais à présent le doute la taraudait… Idril Calafas avait-elle pu, dans un accès de rage envers Ardiosis, envoyer une troupe pour commettre un crime sanglant chez les Nymphes ? Non, cela lui paraissait impossible. Et pourtant, par égard envers Alphaïde, elle souhaitait s’en assurer.

Ma douce reine, permettez-moi d’envoyez quelques espions afin d’enquêter du côté elfe sur cette jeune fille nommée Helveä. Et aussi, accordez-moi une dernière faveur : laissez-moi aller consulter la Reine des Amazones.
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MessageSujet: Re: Deux reines chez les Nymphes [Ne pas archiver]   Deux reines chez les Nymphes [Ne pas archiver] EmptyDim 1 Nov 2009 - 12:03

Elle se leva et le plus naturellement du monde, s’assit à coté d’elle. Le geste tant que le regard qu’elle eut pour la jeune souveraine, elle aurait pu l’avoir pour son fils. Alphaïde pensa à sa mère : elle aurait eu la même attitude : rassurante, réconfortante.
Elle écouta Eluthiel avec attention. La reine des Elfes avait infiniment plus d’expérience qu’elle et après tout, c’était son avis qu’elle avait voulu avoir en la conviant ici ce matin. Et il lui fallait bien avouer qu’il était agréable de se reposer sur quelqu’un pour une fois.
Ce que lui dit la reine, Alphaïde l’avait déjà penser et le Conseil s’était chargé de le lui rappeler : méfiance, une jeune fille sortit de nulle part, une preuve trop évidente, tout ceci méritait qu’on prit du recul. Alphaïde le savait. Et loin de la portée du magnétisme étrange de la messagère elfe, son esprit se soumettait à cette idée. Ne pas céder à la facilité que lui apporter ce bout de tissu : accuser les Amazones et mettre un point à cette douloureuse histoire. Elle le savait et pourtant, l’entendre de la bouche d’une personne extérieure, l’entendre de la douce voix de la sage Eluthiel l’apaisait. Plus l’Elfe parlait, plus les idées de la Nymphe semblaient se ranger clairement dans son esprit. Le timbre d’Eluthiel était comme une ensorcelante mélodie calmant les angoisses de la jeune reine. Plongé dans les prunelles bleu océan de son hôte, loin très loin du bleu glacial et tranchant des yeux qui gouvernaient le continent, elle savourait cette impression de reprendre pied. Quand Eluthiel eut fini de parler, la décision d’Alphaïde était prise. Plus au clair avec elle-même, il lui semblait que sa voix était moins lourde quand elle répondit à sa consœur.

Oui, je me suis faite les mêmes remarques au sujet de cette demoiselle. A part quelques mouvements de troupes humaines au loin, il ne m’a pas été rapporté non plus de passage armé et ce morceau d’uniforme amazone semble vraiment résoudre cette affaire providentiellement. Je ne vous cacherais pas cependant que cette Helvea Daline me fait un peu penser à une pythie, une messagère divine venue de nulle part comme dans les contes pour enfants ou les récits des Dieux de la mythologie. Elle a un regard, une aura étranges…

Il n’empêche. Le morceau de tissu colle parfaitement avec l’uniforme et nul ne saurait nier sans faire preuve de mauvaise foi que c’est un uniforme amazone. Je ne connais pas bien la reine Idril, mais après tout, tout le monde connait la fierté de son peuple et on pourrait penser que l’idée d’agir en portant un autre uniforme que le leur leur est inimaginable. A l’inverse, il vient de suite à l’esprit que quelqu’un a cherché à les compromettre. Aucune de ces solutions ne me parait inconcevable.

Alors voilà ce que je vous propose : envoyer des espions vous informer sur dame Helvea comme vous le souhaitiez puisqu’elle est votre sujette. De mon côté, je resterais vigilante aux possibles informations. On me tient au courant de ce qui se passe au Bois sombre comme vous l’êtes au Bois blanc et je ne vois pas de raisons pour interrompre les échanges entre nos peuples, échange de biens comme d’informations.
En revanche, il me parait important pour moi de m’entretenir avec la reine Idril Calafas. Ce sera l’occasion de la connaitre et l’affaire est suffisamment sérieuse pour que je m’en occupe. Aussi, je pense faire le voyage afin d’en discuter de personne à personne.
Bien entendu, si vous souhaitiez venir, votre présence me serait agréable tout autant que bénéfique. Merci, mille fois merci de votre aide ma très chère Eluthiel. Mais cet entretien avec la souveraine Amazone, je dois l’avoir moi-même.


Le ton était sincèrement reconnaissant mais ferme. La décision était sans appel. Alphaïde se sentait décharger d’un poids : celui de ne pas savoir que faire, de ne pas avoir où aller.
Les évènements de l’Erastide lui enlèveraient encore de nombreuses heures de ses nuits, elle le savait. Elle se lèverait encore souvent pour ouvrir sa fenêtre et restait dans la fraicheur mordante à réfléchir dans la pénombre, à tenter de s’évader de ce monde à problèmes devant la clarté laiteuse de la lune. Mais après. D’abord, elle irait voir Idril. Après les questions se reposeraient.

Déchargée de ses soucis, Alphaïde n'en oubliait pas moins que beaucoup d'autres se posaient dans le Gwendir. Elle n'était pas seule au monde, loin de là, et cette visite de sa voisine n'avait pas pour unique objet les doutes d'une jeune souveraine. Aussi s'enquit-elle des raisons que la providence avait pour pousser Euthiel à se rendre au Bois sombre. Car cette visite si peu protocolaire avait ce double aspect pour la jeune Nymphe : un côté léger de recevoir une personne appréciée et un côté plus perceptible de recevoir une souveraine estimée.
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MessageSujet: Re: Deux reines chez les Nymphes [Ne pas archiver]   Deux reines chez les Nymphes [Ne pas archiver] EmptyJeu 19 Nov 2009 - 11:49

Au contact de la Reine des Elfes, il sembla que les traits d’Alphaïde s’adoucirent et que son inquiétude s’apaisa. Eluthiel était une mère et sentait sans cesse le besoin de rassurer les jeunes personnes qui l’entouraient et qui avaient besoin d’une présence mature pour les épauler. Haziel lui manquait terriblement et la jeune femme savait parfaitement qu’en réconfortant les autres, elle transférait ses sentiments maternels qu’elle avait pour son fils sur ceux qui en avaient besoin. Alphaïde était encore jeune et fragile et Eluthiel se devait d’être là pour elle.

Le raisonnement qu’entreprit alors la Reine des Nymphes était plus clair et plus déterminé. Elle partagea ses doutes et ses opinions toutes aussi possibles les unes que les autres. D’ailleurs, sa rencontre avec cette Helveä semblait l’avoir intriguée. Elle compara la jeune fille à une messagère divine, à un être envoyé des dieux, ici potentiellement Baldr puisque c’était une elfe. Eluthiel se demanda si de part son inquiétude et sa fatigue, Alphaïde n’avait pas mal interprété l’attitude de la jeune elfe. En effet, elle imaginait mal Baldr envoyer une messagère dans un autre royaume que celui de son peuple. Ou alors, la jeune Helveä avait menti sur ses origines.

Une messagère divine ? Cela me semble étrange… Baldr n’a qu’un seul intercesseur entre son peuple et lui : notre grande prêtresse. Bien des Elfes clament être l’incarnation de Baldr sur les terres du Gwendir mais il s’agit le plus souvent de charlatans ou de comédiens. La religion est très importante pour les Elfes et oser se prétendre une nature divine est blasphématoire ! Cette jeune fille m’inquiète de plus en plus…

Alphaïde exprima alors les deux hypothèses qui pouvaient expliquer la présence de troupes amazones dans le Bois Sombre. La Reine Idril était-elle coupable ou non ? La jeune nymphe ne savait quoi penser. En effet, émettre une opinion sur une personne que l’on n’avait jamais rencontrée était une tâche ardue et Eluthiel le comprenait parfaitement. Aussi, lorsqu’Alphaïde répondit par la négative à la proposition de l’Elfe, un sourire se dessina sur les traits de celle-ci. Cette jeune reine était étonnante. Alors qu’elle aurait pu choisir la facilité en laissant Eluthiel aller s’expliquer avec la Reine des Amazones, elle décidait de s’exposer au danger et de sortir de son royaume. Elle prenait le risque de faire face à la potentielle coupable du meurtre de l’Erastide tout en ayant conscience du climat qui régnait sur les terres continentales. Jamais l’estime d’Eluthiel pour la Reine des Nymphes n’avait été aussi grande. Fière de partager le royaume de verdure que formait la forêt de l’Ellendwraï avec cette jeune femme si courageuse, Eluthiel la prit soudainement dans ses bras avant de la relâcher aussitôt. L’étreinte fut brève mais symbolique.

Pardonnez moi pour ce geste déplacé chère Alphaïde mais je suis aussi fière de vous qu’aurait pu l’être votre mère si elle était encore à vos côtés. Je suis persuadée qu’au côté de Jord, des larmes de joie et de fierté coulent sur ses joues rosies. Vous faites preuve d’une grande sagesse et d’une époustouflante maturité mon Amie. Et au nom du peuple des Elfes, nos cœurs se gonflent d’orgueil d’être à vos côtés. Nos prières et notre bienveillance vous suivront partout où vous irez.

Son discours relevait plus de l’intimité que de l’ordre protocolaire. Néanmoins, à travers ses paroles, Eluthiel souhaitait renouveler l’alliance entre les deux peuples et ce, à n’importe quel prix ou décision de la part des Nymphes. Ainsi, pouvait-on voir là une double alliance de la part des Elfes. La promesse d’être du côté de la Résistance mais aussi de protéger le peuple des Nymphes. Aussi, la Reine des Elfes s’aperçut que ceci était en contradiction avec les raisons de sa venue qui consistait au départ à convaincre les Nymphes de se rallier à la cause résistante. Mais, après les accusations émises à l’encontre d’Idril Calafas, toute proposition de ralliement devenait impossible. Alors, quand la Reine des Nymphes demanda à Eluthiel les raisons de sa venue, celle-ci préféra en offrir qu’une façade en expliquant qu’elle souhaitait prouver son soutien au peuple nymphe, peu importe les décisions qu’il prendrait dans le futur. Mal à l’aise d’avoir dû cacher un morceau de la vérité à sa consœur, Eluthiel décida qu’elle devait rentrer à Amil-Gadia bien qu’elle aurait aimé rester plus longtemps. Aussi, eut-elle l’idée rebondir sur une des propositions d’Alphaïde.

Malgré la plénitude que m’offrent ces lieux, je me dois de repartir en mon domaine. En effet, comme vous l’avez suggéré, je vais enquêter sur cette jeune Helveä. Et aux vues des propos qu’elle vous a tenue, je me dois de me dépêcher… Je vous remercie pour votre grande hospitalité et remercie Jord d’avoir créé un peuple si généreux.

Après plusieurs salutations et adieux, Eluthiel repartit en direction du royaume des Elfes. Alcarinquë, la jument blanche, galopait rapidement à travers les bois, les naseaux fumant et la crinière ébouriffée. Sa cavalière prenait du plaisir, écoutant le vent siffler quelques mélodies à ses oreilles. Encore l’esprit prisonnier de cet entretien, elle ne devinait pas les dangereux évènements qui se dérouleraient les prochains jours.
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