Le soleil disparaissait derrière les toits de la capitale humaine. La basse ville reprenait son activité. Les manants revenant d'une journée bien remplie, les voleurs et autres hors-la-loi commençaient la leur. Mes gens se pressaient dans les quartiers où régnait le plus souvent une odeur pestilentielle. Bientôt, la longue procession dont les membres se croisaient dans un sens ou autre fut interrompue par la silhouette d'un animal courrant à toute vitesse, se frayant un passage parmi les passants. On aurait pu croire que c'était ce chat au pelage d'ébène qui avait la priorité et non les autres humains. Quelques cris de protestation s'élevèrent mais le félin qui était déjà bien trop loin les ignora. Remarquant au passage une bague qui n'attendait visiblement que d'être dérobée au bout d'un doigt, le chat s'en saisit et reprit sa course la seconde suivante, un bijoux entre les crocs.

Puis, sans risque d'attendre la réponse éventuel du bedonnant propriétaire de la bague, Elyon s'en fut par les toits. Le mince chat noir aux yeux d'améthyste bondit sur le hauvent d'une boutique du quartier et atteint les toits. A vive allure, ce félin sauta d'un toit à l'autre, désormais bien rôdé à cet exercice périlleux. L'espace d'un instant, la jeune fille transformée en félin se demanda si elle avait bien les neuf vies d'un chat. Dans le doute, elle ne chercha pas à s'approcher du sol désormais lointain des rues sous elle. Sa course fut interrompue par le raillement moquer d'un aigle qui traversait les cieux. Ava feula puis reprit sa course, rattrapant au passage la bague qui manquait de retomber vers les rues. Elle reprit sa course un peu plus vite au mépris du danger. Dans les semaines qui suivaient, elle s'exposerait sans doute à un danger pire que la chute du haut d'un toit. Et grâce à son instinct, elle retomberait sur ses pattes si elle en avait la hauteur suffisante.

Bientôt, il lui fallut arrêter de courrir sur les toits. Elle arriva devant une place et jeta un coup d'oeil devant le lieu du rendez-vous. Devant la fontaine dont le fond était tapissé de moisissure attendait un aigle. La féline descendit lestement du toit, la bague toujours entre ses petits crocs pointus. Une fois qu'elle eut balayé la place du regard et constaté qu'elle était vide, elle se transforma. Le chat au pelage de jais et à la truffe rose disparaissant sous sa fourrure hirsute se métamorphose en belle jeune fille vêtue d'une tenue légère rouge capucine. D'un mouvement rapide, elle retira la bague qui reposait encore sur sa langue. Machinalement, elle l'essuya rapidement avant de la tremper dans la fontaine pour la nettoyer en détail et juger de sa valeur.

Puis la jeune fille vêtue d'une provocante bande de tissu qui cachait ses attributs féminins, d'une courte jupe fendue sur le côté et d'une paire de courtes bottes de marche se dirigea vers le cheval appartenant à sa soeur qui attendait patiemment dans un coin de la place. Elle fouilla son sac et trouva une ample cape noire qu'elle enfila pour garder son corps gracieux au chaud. Si elle s'habillait de tissus légers, c'est bien parce qu'elle avait remarqué que sa transformation était des plus évidentes lorsqu'elle avait moins d'objets autour d'elle à transformer. Elle retourna s'asseoir près de l'aigle et marmonna, légèrement boudeuse:

-Bravo, tu as encore gagné. J'arrêtes de faire la course avec toi, c'est trop évident à vol d'oiseau! Enfin, je n'ai pas perdu mon temps.

Sur ce, elle ouvrit la main pour laisser apparaître la bague qui reposait au creu de sa paume. L'objet était de petite taille, une pierre verte y étaient montée sur un anneau d'or. A bien l'observer, on s'apercevait que l'objet était encore un peu sale mais les crocs de félin d'Ava au moment où elle l'avai récupéré ne semblaient pas l'avoir abîmé. D'ailleurs, la jeune fille espérait bien la revendre bon prix. De quoi avoir un peu d'argent avant sa première solde de soldat pour l'Empire. Enfin magicienne. Mais d'abord, il lui faudrait se mettre d'accord avec sa soeur. Et trouver quelqu'un pour les recruter dans la même unité. Elles formaient un bon duo et puisque les femmes étaient rares dans l'armée, elles pourraient toujours avancer le fait de loger dans la même chambre. Restait maintenant à persuader sa soeur de faire ce qu'il fallait le jour du recrutement. Mais Avengeline restait confiante.

Mais elle savait très bien que, même à pied, elle distancerait sa sœur facilement. Elle entendit au loin une musique se levers. Sans prendre le temps de réfléchir elle commença à danser. Ses pieds bougeaient à une vitesse impossible. Elle se dirigea vers son cheval qui hennit à l'iddée de la voir aussi joyeuse. Cette danse improvisée réveilla en elle une envie pressante de savoir ce que mijotait sa sœur. Elle lui fit un grand sourire et lui demanda :

La réponse de sa jumelle arracha un petit sourire à Elyon. Comme si elles allaient refaire une course de sitôt... De toute manière, tout se passerait de la même manière. L'aînée la laisserait gagner, comme toujours. Bien sûr, Elyon pouvait être plus rapide qu'elle. Mais elle ne pourrait jamais s'empêcher, du moment que tout cela n'était qu'un jeu, de laisser sa soeur prendre l'avantage pour lui donner la fierté de l'avoir devancée. Etrange sentiment qu'ont les aînés de vouloir toujours faire plaisir à leur cadet pour lui donner un faux sentiment de mérite. La druidesse resta impassible. Elle avait du mal à se dire que sa soeur et elle s'étaient retrouvées. Et les questions trottaient dans sa tête en grand nombre. Il lui fallait assumer son devoir d'aînée et prendre des décisions pour elles deux. Une fois de plus, son rôle lui pesait. Mais elle l'assumerait, comme toujours. Il en était ainsi et en serait toujours de même.

-Nous verrons bien, il y a plus important à régler pour l'instant.

Leur entrée dans l'empire était en effet plus importante. Il leur fallait faire bonne impression dès le début, mettre leur pouvoir de transformation en avant et leurs qualités, passer sur les défauts. Il était important de toujours se mettre du côté des vainqueurs, et puisqu'Ardiosys Bennefoy avait déclaré la guerre, c'est qu'il avait les moyens de la remporter. Néanmoins, dans l'immédiat, Elyon avait des projets qui malheuresement ne concernaient pas sa soeur. Elle comptait assister à l'enterrement de la reine Faldora. Sous son règne, le peuple druide lui avait semblé heureux, et après avoir quelques années dans la contrée de ses origines, elle comptait au moins rendre hommage au si juste monarque d'un pays qy'elle avait appris à aimer.

-Je compte me rendre en pays druidique d'ici quelques jours pour l'enterrement de la reine.

Une partie d'elle-même aurait aimé y rester et fuir cette guerre qu'elle pressentait sanglante. Mais quoi qu'elle fasse, elle y aurait un rôle, à qui bon se voiler la face? L'espace de quelques trop courts instants, elle regarda danser sa soeur. L'époque de sa propre innoncence lui semlait bien loin. Il y a longtemps qu'elle n'avait pas eu l'envie de danser, de dépenser son énergie de la sorte pour se montrer qu'elle était en vie et que celle-ci était belle.

-Iseut, inutile de te le cacher, nous devons rallier les rangs de l'Empire. Dès mon retour, il nous faudra nous faire recruter. Nous n'avons pas vraiment le choix. Et l'Empire peut nous offrir un pouvoir que nous n'avons pas les moyens de refuser.